
L’association Ensemble pour l’Education de la Petite Enfance a proposé une interview en Live sur Facebook Mardi 26 mai avec le Dr Boris Cyrulnik afin de répondre à nombreuses questions sur le Virus et l’Attachement.
LE VIRUS
Définition : C’est un brin de protéine avec une petite capsule de glucide et de graisse et quand cette protéine se colle contre une cellule, elle se faufile, elle entre et elle modifie complètement le métabolisme de la cellule.
Ça peut provoquer soit des destructions du cerveau pour la cible cérébrale, soit la destruction des poumons quand la cible est pulmonaire.
Le virus n’est pas seulement un brin d’ADN, c’est un problème profondément humain, culturel et affectif.
Dès l’instant où la glaciation est arrivée, la viande est devenue seule facteur de survie. Ainsi, il a fallu tuer des animaux pour ne pas mourir et s’entrainer à manger de la viande.
👉 On créer les conditions techniques et culturelles du virus. On fabrique le virus par des élevages, on le transporte avec des avions et on provoque des épidémies de virus.
Ça arrive régulièrement depuis que les êtres humains se civilisent, il y a régulièrement des épidémies de virus qui parfois tues énormément de personnes comme la grippe Espagnole.
LE VIRUS, MA MERE ET MOI
L’enfance préverbale est un moment important et le milieu d’un enfant préverbale est sa mère.
Si la mère est entourée et soutenue par son mari, par son histoire, par sa famille, par la société même s’il y a le virus, c’est une jeune adulte qui saura affronter les problèmes du virus. L’enfant n’aura rien et sera dans son univers. Son monde écologique ne changera pas.
Si la mère est altérée par la maltraitance familiale. Lorsque la violence arrive dans un foyer l’enfant est altéré. Même s’il n’est pas touché physiquement. Parce qu’il a peur, il est sidéré car il voit ses 2 figures d’attachements : sa mère, son père hurler, crier, et casser.
- 👉 C’est une agression cérébrale très importante.
- 👉 L’enfant est sidéré, son cerveau bloque, ne fonctionne plus et arrête ses développements.
En revanche, la plasticité cérébrale est tellement grande à cet âge là, même si un bébé préverbale est facile à traumatiser, il est facile à réparer. Si on sécurise le bébé, on sécurise la mère, on agit sur le milieu.
👉 Le processus de résilience en 24h/48h se déclenche. Le processus de développement mental reprend son cours normal.
Un bébé est facile à blesser mais pas d’inquiétude, un bébé est facile à réparer à condition d’agir sur le milieu qui agit sur le bébé.
SE TAIRE OU TROP PARLER DU VIRUS ?
Dès que l’enfant parle, il va être angoissé par le vide. Il va bien voir qu’il y a des comportements étranges qu’il ne va pas comprendre et qui ne sont pas le rituel habituel.
Si on ne dit rien 👉 il va être angoissé.
Si on dit trop 👉 il va être effrayé.
Si le parent est effrayé, l’enfant vit dans une écologie effrayante et il est effrayé. Symptôme : énurésie, encoprésie, refus alimentaire, agitation, cauchemars… Ce sont des signes cliniques qu’on comprend facilement.
Qu’est-ce qui faut faire entre les 2 extrêmes ?
Il faut parler en expliquant et de manière enjouée parce que le jeu pour un bébé, un enfant c’est un mode d’apprentissage.
- 👉 C’est par le jeu qu’on se familiarise, qu’on domine la peur.
- 👉 Expliquer avec des scénettes. Elles sont importantes. C’est un processus de familiarisation, d’apprivoisement de la peur.
DU VIRUS A L’ATTACHEMENT
A l’âge de 10 mois, tous les enfants ont déjà acquis un petit style de socialisation qui est l’attachement.
2 enfants sur 3 à 10 mois ont déjà appris à exprimer leurs émotions et à se faire comprendre par des pleurs, par des sourires, par des frayeurs, par des mimiques, par le pointé du doigt.
Ils arrivent déjà à interagir, ils ne parlent pas, commencent quelques mots mais déjà on est dans l’intersubjectivité.
- 👉 Travailler sur nous pour les sécuriser.
- 👉 On peut apprendre à se contrôler soi-même pour sécuriser les enfants.
- 👉 Ces enfants sont faciles à consoler, agréable à aimer donc facile à récupérer en cas de stress.
1 enfant sur 3 a déjà un peu de mal et a acquis un attachement évitant.
Il ne sait pas s’exprimer, a peur des autres, a un attachement ambivalent et il peut agresser les gens qu’il aime.
👉 Ce n’est pas des enfants faciles à aimer. On ne comprend pas pourquoi ils nous agressent et eux non plus ne comprennent pas.
Ce qui sécurise un enfant, même en plein virus
👉 C’est l’organisation de cette niche sensorielle où la mère est la figure d’attachement principale mais ou le père à un rôle important beaucoup plus tôt que ce qu’on croyait.
👉 Le père peut agir sur la mère qui agit sur le bébé. Il peut agir sur le bébé de façon à ouvrir le champ affectif du bébé qui apprend à aimer des figures attachement différentes.
Ce virus qui est un brin d’ADN, c’est profondément un phénomène de civilisation. Cela agit sur notre réaction au virus et c’est déjà un processus de structure de l’attachement.
DECONFINEMENT ET VIRUS
Les épidémies sont cycliques et font des catastrophes humaines énormes.
Il y a 3 scénarios
👉 On remet en place ce processus d’hyperconsommation, d’hypermobilité et dans 2 ans il y aura à nouveau un virus dont on ne connaitra pas la formule chimique. On ne sera toujours pas ce qu’il faut faire.
👉 Quand les gens sont anxieux et ne supporte pas l’incertitude comme on le constate maintenant. Ces gens veulent qu’on leur donne des vérités et c’est les gens qui votent pour des dictateurs. On voit que sur la planète il y a un grand nombre de dictateurs ont été élu par des gens déboussolés, par le bouleversement sociale ce qui est notre cas actuellement.
👉 On va être ruiné, on l’est déjà peut-être. Comment aider les pays que la France aidait : l’Afrique, le Proche-Orient on pourra plus leur envoyer de l’argent. Il va y avoir des famines et quand il y a des famines, il y a des guerres, inévitablement. Et pour économiser des vies en occidents, on va provoquer des morts en Afrique et au proche orient.
Ce que propose Boris Cyrulnik
On est invité au débat, à se réunir pour réfléchir ensemble et pour apprendre à parler ensemble. Ce qui n’a pas été le cas ces dernières années, où les politiciens ont mis en scène la haine et non pas l’explication.
👉 Donc il faut qu’on apprenne à parler. Il faut démocratiquement qu’on se mette ensemble à résoudre les problèmes et là il y a plein d’espoir.
👉 On voit très souvent après les pestes, les épidémies, les catastrophes. On a de véritable révolution culturelle et les gens apprennent à mieux vivre ensemble. Le droit de vote des femmes en 1945, c’est une révolution culturelle provoqué par la 2nde guerre mondiale.
Il n’est pas nécessaire de refaire une guerre pour faire une évolution, le débat démocratique sera suffisant.
Le virus n’est pas seulement un brin d’ADN, c’est un problème profondément humain.
RAVIVER LA MEMOIRE
Traces mnésiques
Cette crise sanitaire laissera des traces neurologiques et sculptera le cerveau. Il n’y aura pas de traces pathologiques sauf si la situation dure trop longtemps.
Ca s’appelle l’isolement sensoriel et là c’est des dégâts cérébraux.
Un bébé va garder des traces très longtemps et pas que de la souffrance. Des que l’enfant retrouvera des bras sécurisant autre que la mère et le père.
La vocalité
La voix est très importante elle sculpte le cerveau des enfants. Une linguiste qui s’appelle Bénédicte De Boysson-Bardies, a fait une étude sur le babillement des bébés de 10 mois. Avec l’accent de leur babillement, on savait quelle langue ils allaient parler plus tard. Ils avaient l’accent sans avoir prit les mots mais en ayant appris la musique des mots.
Parler c’est très important et dés la grossesse. Les basses fréquences de la voix maternelle viennent caresser le bébé. C’est déjà une information de touché et familière pour le bébé.
Retrouver un extrait « Spécificité des babillages selon les caractéristiques des langues cibles » du livre Le Développement dans la première année de Bénédicte de Boysson-Bardies.
La plasticité du cerveau est telle que s’il y a un manque de quelques mois, les premiers mois vont être étranges, puis on va reprendre vite les circuits de la mémoire déjà établis.
Il sera très facile de retrouver la mémoire.
DE LA MALTRAITANCE A LA RESILIENCE
Quand un bébé est maltraité à la maison, il est avide de gentillesse. Pour ce bébé, un petit signal gentil est une information vitale.
L’isolement affectif est la principale maltraitance.
Même si on ne touche pas le bébé, la violence conjugale est un traumatisme pour le bébé. Même s’Il n’est pas physiquement touché émotionnellement il est violemment touché.
Pour un bébé, une personne qui le prend dans les bras, qui le sécurise, qui le fait sourire, qui le nourrit, qui le toilette, déclenche un processus de résilience très rapidement. Un éducateur, une assistante maternelle, quelqu’un qui s’occupe gentiment du bébé est un tuteur de résilience.
TUTEUR.RICE DE RESILIENCE
Mémoire de la maltraitance
Pour un bébé qui parle ou un grand enfant, un problème se pose. Il a dans sa mémoire une représentation de soi, s’il a été maltraité, battu ou insulté pendant des années, l’enfant a acquis une mémoire de la maltraitance.
Des mots insultants sont de la maltraitance.
Le grand enfant dit « mon identité : je suis celui ou celle qu’on bat, je suis celui ou celle qu’on maltraite ».
- 👉 Il a une représentation de lui d’enfant maltraité : « c’est normal qu’on me maltraite, dans toute les familles ont fait comme ça. Je souffre, je suis malheureux mais c’est comme ça ».
- 👉 L’enfant répond à ce qui est dans sa mémoire.
A contre-sens
Il peut y avoir des contre-sens avec les tuteurs de résiliences. Il y a beaucoup d’éducateurs, de psychologues, de personnes qui veulent s’occuper des bébés et qui comprennent mal pourquoi le bébé qu’ils s’occupent gentiment, les repousse. L’enfant ne répond pas à la gentillesse, il est même angoissé par la gentillesse. Il répond à ce qu’il y a dans sa mémoire. « On me maltraite, je ne sais pas comment faire pour répondre à la gentillesse.
Si on n’a pas compris, il peut y avoir des contre-sens entre l’enfant maltraité qui est difficile à aider et l’adulte qui veut l’aider et qui ne comprend pas pourquoi l’enfant l’envoi promener. Il répond à ce qui est inscrit dans sa mémoire, parce qu’il n’a pas appris à répondre à un éducateur ou un parent sécurisant.
LE MASQUE EN CRECHE
Le confinement est un événement dans la vie de l’enfant et ça laissera des traces.
Pour l’immense majorité des enfants, ça va être un jeu.
Pour une minorité des enfants, ça va être une angoisse, surtout les enfants dont on ne sait qu’ils sont psychotiques. Ces enfants qui ont du mal à décoder les mimiques faciales vont avoir encore plus de mal avec le masque. Quand un enfant écoute les personnes parler, il regarde la partie supérieure de la bouche. Avec un masque il sera privé d’information.
RETOUR A L’ECOLE
Tous les enfants ont pris du retard.
Ils vont retourner dans une école étrange avec moins de vivacité, moins de gaité qu’avant. En revanche, beaucoup d’enfants qui été embête d’aller à l’école, après 2 mois de confinement, disent qu’ils veulent revoir leur copains.
👉 Il y a un rebond d’attachement.
Ces enfants vont être désorientés pendant un mois ou 2. Ce n’est pas forcément grave car les gestes barrières ils vont peu les respecter. Au début, ils vont faire un petit effort et ils vont oublier, c’est des enfants, ils ont envie de jouer, parler.
C’est un raisonnement probabiliste : plus on multiplie les facteurs qui éteigne le virus, plus probablement on va l’éteindre.
La stratégie que la France a adoptée est cruelle et terriblement couteuses. On est ruiné.
👉 C’est une occasion inespérée d’apprendre à vivre autrement.
Les enfants retournant dans une école étrange avec beaucoup d’enfants absents, ils vont régler le problème dans quelques mois. Ils vont partir en vacances cet été. A la rentrée, il y a aura une « vraie » école et les enfants rattraperont leur retard.
Et pour les bébés, ce n’est pas très grave.
GARÇON VS FILLE
Pour les grands enfants, le retard pris est beaucoup plus grave surtout pour les garçons.
GARCON
👉 Décrochent plus facilement que les filles.
👉 Etant XY, si une anomalie est portée par un chromosome il n’est pas compensé par l’autre chromosome X, l’anomalie s’exprime.
👉 En consultation pédopsychiatrique, il y a beaucoup de petit garçon.
👉 Il y aura probablement beaucoup de garçons qui auront du mal à accrocher ensuite.
FILLE
👉 Une avance neuropsychologique de développement.
👉 Etant XX, si une anomalie est portée par un chromosome X et n’est pas portée par l’autre chromosome X, l’anomalie ne s’exprime pas.
👉 Plus stable émotionnellement, plus obéissante, plus gentille, plus agréable à élever.
👉 Avoir des marquages au sol, ce n’est pas traumatisant. Elles jouent à la marelle déjà. Pourquoi vont-elles traumatise par des ronds et carrés au sol ?
Il faut être créatif et intégrer l’enfant à la réflexion.
SECURISER LE PARENT
Les contes pour enfants
L’enfant est sensible à ce qui est transmit. En revanche, il n’est pas sensible à la cause de ce qui est transmit. Si ses parents ont des soucis mais s’ils savent les exprimer gentiment, en se servant d’un film, en racontant sa propre histoire ou en se servant d’un conte l’enfant ira bien.
- 👉 Les contes pour enfant sont des précieux moyens de transmettre des informations.
- 👉 Ils permettent de présenter dans un monde d’enfant et de transformer l’angoisse en quelques choses de positif.
La vie n’est pas toujours facile.
- 👉 Mais si on établit des liens, si on repère des personnes importantes pour nous et qu’on apprend à bien s’expliquer, a bien parler : on apprend à se débrouiller dans la vie.
- 👉A Ce moment là, les enfants sont fières de surmonter les épreuves.
Le deuil
Pendant le confinement, il y a des parents qui ont perdus leurs propres parents dans les EHPAD et dans des conditions où le deuil va être difficile à faire. Mais s’ils comprennent qu’ils ont un deuil difficile et s’ils racontent aux enfants quelques choses de compréhensible dans un monde d’enfants.
👉 Les enfants vont très vite comprendre et ils vont reformuler avec leurs propres mots.
Les enfants garderont dans leur mémoire mais n’en souffriront pas.
MERCI
Association Ensemble pour l’Education de la Petite Enfance www.eduenemble.org
Enfance & Covid www.enfance-et-covid.org
Boris Cyrulnik www.boris-cyrulnik-ipe.fr